Renforcer l’employabilité de jeunes tout en répondant à la problématique des déchets

Renforcer l’employabilité de jeunes tout en répondant à la problématique des déchets

22 mars 2020

L’ONG Entrepreneurs du Monde a initié au Togo en 2012 Assilassimé Solidarité, un programme de microfinance sociale destiné aux personnes les plus vulnérables, puis, en 2013, un programme d’accès à l’énergie dénommé MIVO Energie et en 2018 MIAWODO, un programme d’appui à l’insertion professionnelle et à la création de TPE.

Dans le cadre de ce dernier, elle veut aujourd’hui créer une entreprise-école pour renforcer l’employabilité de jeunes, tout en répondant à la problématique des déchets à Lomé. Ainsi les apprentis auront la possibilité d’être formés en conditions réelles à différents métiers au sein de l’entreprise-école. Et à l’issue du parcours, ces jeunes seront accompagnés vers un emploi qualifié en entreprise ou dans le lancement de leur propre entreprise.

 

La problématique des déchets à Lomé, capitale du Togo

A Lomé, au Togo, chaque habitant produit en moyenne 0,6 kg de déchets par jour. La capitale, Lomé, émet plus de 250 000 tonnes de déchets ménagers (organiques, plastiques, verre, papier, etc.) par an, dont à peine 10 % sont valorisés.

Malgré de belles initiatives existantes, le système de collecte, de tri et de transformation reste insuffisant. De nombreux espaces (rues, terrains vagues, lagunes, cours d’eau) sont encombrés de déchets et les feux de déchets sont pratiques courantes, ce qui a pour conséquence de provoquer de nombreux débordements de canalisations et des émissions de fumées nocives.

L’équipe d’Entrepreneurs du Monde voit tous les jours l’impact qu’ont les déchets sur l’environnement des habitants de Lomé, notamment des plus démunis. Elle a donc décidé de créer une entreprise-école pour orienter les jeunes qu’elle accompagne vers le secteur de la gestion des déchets.

Un diagnostic approfondi

Entrepreneurs du Monde a engagé Jérémie Boissinot, un professionnel français de la gestion des déchets, pour réaliser un état des lieux approfondi et émettre des recommandations.

La première phase de l’étude a consisté à collecter les données relatives aux déchets produits sur Lomé auprès de la Mairie et des acteurs locaux. L’étude a permis de mettre en évidence la composition des déchets : 35% des déchets sont des fines (sable, cendres, etc.), 20% des déchets organiques (épluchures, restes alimentaires, etc.), 15% des déchets verts (branches, feuilles d’arbres, etc.) et 10% du plastique. Le reste est composé de papiers, cartons, textiles, métaux, verre, etc.

De manière générale, les déchets sont envoyés à plus de 80% vers un Centre d’Enfouissement Technique à 25km au nord-ouest du centre de Lomé. Les 20% restants sont soit recyclés, soit brûlés, soit jetés dans des dépôts sauvages non autorisés.

L’étude a aussi permis de rencontrer une grande partie des acteurs de la collecte (système de collecte formel et informel), du tri et de la transformation des déchets (enfouissement, recyclage, valorisation, etc.) et de comprendre leur fonctionnement.

WOEREBOU

La collecte des déchets à Lomé

Le circuit de collecte formel actuel se décompose en deux modèles :

– La collecte directe des déchets chez les particuliers. Les collecteurs sont rémunérés par la Mairie (environ 6 000 FCFA/tonne) et expédient les déchets vers le Centre d’Enfouissement Technique ;

– La pré-collecte chez les particuliers, où les pré-collecteurs sont directement rémunérés par les ménages. Les déchets sont acheminés vers des centres de transit intermédiaires ou des dépôts sauvages pour être ensuite envoyés vers le Centre d’Enfouissement Technique. Mais ce fonctionnement ne permet pas aux pré-collecteurs de pérenniser leur activité.

La répartition entre pré-collecteurs et collecteurs est faite par la Mairie et est souvent liée à l’accessibilité des véhicules dans les quartiers et à la distance de ces derniers avec le Centre d’Enfouissement Technique. Ces opérations représentent un immense budget pour la Mairie de Lomé, avec un coût de gestion moyen de 12 000 FCFA/tonne, en constante augmentation.

Ces services de collecte pouvant être très onéreux et mal adaptés (fréquence de collecte trop faible), une part de la population passe par des collecteurs informels pour évacuer leurs déchets ou les brûlent, ce qui dégage une pollution importante composée de particules fines.

Par ailleurs un véritable réseau informel de collecte des déchets s’est créé dans la ville : collecte de métaux, de bouteilles plastique, de bouteilles de verre, etc. Dans ce cas, les déchets sont principalement réutilisés ou revendus pour être recyclés.

A ce jour, peu d’entreprises locales font du recyclage et la plupart des déchets sont transférés à l’étranger. A noter qu’il existe néanmoins une unité de compostage de déchets organiques à Lomé, d’une capacité de 5 000 t/an. Cette unité capte les ordures ménagères et les transforme en compost.

WOEREBOU

Un projet pilote d’entreprise-école

En 3 mois, Jérémie a acquis une connaissance fine de la gestion des déchets à Lomé, a identifié des besoins prioritaires et a proposé des pistes d’action variées. Pour évaluer la capacité de chacune des pistes à répondre aux besoins prioritaires de nos publics et à se pérenniser, il a créé une grille de notation avec des critères quantitatifs, techniques, financiers et environnementaux pour chaque déchet.

Et il a ainsi sélectionné plusieurs micro-projets qui seront testés au sein de l’entreprise-école en 2020 :

– Activités de collecte au sein d’établissements scolaires/universitaires, de groupements et d’organisations de la société civile, d’entreprises, de ménages au sein de quartiers ciblés ;

– Activités de transformation des déchets collectés : organiques (compostage), déchets verts (broyage), plastiques (transformation en hydrocarbures), pneus et lampes solaires (recyclage).

A travers ces deux activités phares, les équipes de l’entreprise-école proposeront aussi à leurs clients des sensibilisations et des formations destinées à leurs équipes et partenaires. Un service d’étude des flux de déchets au Togo sera également proposé.

Au bout de 10 mois, les micro-projets retenus constitueront la base d’activités. Ainsi, les apprentis participeront aux activités de l’entreprise, tout en étant accompagnés en parallèle dans leur projet professionnel ou entrepreneurial, en vue de les préparer à une sortie positive à la fin de leur apprentissage en entreprise.

Ce projet d’entreprise-école permet aussi à Entrepreneurs du Monde de créer de nouveaux partenariats clés au sein d’un projet ambitieux de traitement des déchets.